Accès indirects : SAP réclame 600 millions USD à AB Inbev !
SAP America exige une indemnité de plus de 600 millions USD à Anheuser-Busch, filiale d’AB InBev. Une nouvelle affaire d’accès indirects !
Après avoir réclamé 64 millions USD à Diageo, SAP réclame aujourd’hui 600 millions USD au groupe AB InBev, à travers sa filiale américaine Anheuser-Busch. En cause, une question d’accès indirects. En bref, lorsqu’un système tiers accède à SAP pour échanger en direct des données, les utilisateurs de ce système tiers sont considérés -par l’éditeur- comme des utilisateurs de SAP.
Dans l’affaire Diageo, le juge a accepté -en février passé- l’argument de SAP selon lequel même l’accès indirect à son logiciel nécessitait une licence, mais n’a toujours pas statué sur le montant final dû, qui pourrait correspondre à ce que la société a déjà payé en droits de licence depuis douze ans… Le contexte ? En 2012, Diageo lançait deux projets de CRM bâtis sur Salesforce, et connectés à SAP via une infrastructure d’échange disposant d’une licence légitime pour accéder aux données. L’éditeur allemand a estimé que cette licence était insuffisante et a assigné son client en justice, exigeant que tous les utilisateurs qui accèdent aux données SAP via l’infrastructure d’échange s’acquittent d’un droit d’usage.
Même cas de figure chez le géant belgo-brésilien, dont il est fait mention dans le dernier rapport annuel. Et si AB Inbev utilise également Salesforce, aucune des parties ne peut dire si les accès indirects litigieux ont pu se faire via cette solution, bien qu’AB Inbev soit un client de Salesforce et qu’un représentant d’AB Inbev a présenté un projet d’entreprise pour accéder aux données dans son système SAP via ce CRM.
Selon AB Inbev, SAP a demandé un arbitrage à New York le 21 février. Et précise aujourd’hui «avoir l’intention de se défendre vigoureusement contre les affirmations de SAP» –sans en dire plus. L’issue n’est donc pas pour demain. Pour preuve, le précédent avec Diageo. Incapable de déterminer le nombre exact d’utilisateurs physiques qui ont accédé à l’ERP sans être couverts par les licences, la juge britannique Finela O’Farrell a décidé de reporter à plus tard le calcul des frais de licence. Elle a également estimé que Diageo était de bonne foi et qu’il n’y a pas eu d’usage frauduleux de mySAP Business Suite. Enfin, elle a conclu son jugement en précisant que SAP n’avait pas droit à un dédommagement supplémentaire.
Bien qu’AB Inbev ne soit sans doute pas satisfait de la plainte de SAP, il est probable qu’il préfère la confidentialité de l’arbitrage. Ce qui signifie que l’on en connaitra jamais l’issue… En même temps, le groupe brassicole entend défendre son image : l’insuffisance de licences souscrites -avec en filigrane du «vol de logiciels»- est incroyablement sensible en termes d’image, a priori pour une entreprise cotée.
Cette affaire relance la question des accès indirects. De toute évidence, cette notion est -et reste- floue, observent nombre d’associations professionnelles. Et d’exiger que SAP accepte enfin de la définir, clairement et de manière univoque, dans un cadre partenarial avec les utilisateurs. A les entendre, SAP doit répondre au «flou actuel de sa politique de licensing». Pour EuroCIO, en particulier, «les données confiées aux systèmes SAP n’appartiennent pas à SAP mais aux entreprises, et ce qu’elles en font une fois que ces données en ont été extraites ne regarde qu’elles». Et de rappeler que, dans le cas de Diageo, les données de SAP exploitées dans Salesforce sont extraites par une passerelle, fournie par l’éditeur allemand et dûment déclarée. «A partir de là, l’entreprise devrait pouvoir faire ce qu’elle veut des données, faute de quoi on entre dans un modèle qui n’est pas soutenable pour les entreprises».