Face à la crise sanitaire du moment, Pierre Dumont, NTT (*), craint davantage le choc économique qui suivra. Le parfait exemple du monde VUCA !

° Le 16 mars, notre pays entrait en phase de confinement. Comment avez-vous abordé cette première journée de crise inédite ?

Pour NTT, les conséquences du confinement sont relativement limitées. Nous avons une grande expérience du télétravail, choisi par la moitié du personnel. Aujourd’hui, bien sûr, nous sommes à… 97 % ! Au premier jour de la crise, j’ai pu être en contact avec plus de 600 employés via un événement WebEx !

Pour ce confinement, nous avons créé un micro-site spécifique à cette crise, pour suivre au plus près, à travers nos échanges, les problèmes auxquels nous étions confrontés que ce soit à titre professionnel ou privé. Et comme nous sommes tous impactés, à des degrés différents, nous avons ouvert cet outil à nos familles. Aujourd’hui, cette plate-forme de partage est devenue notre lieu de rencontre quotidien. Nous avons même organisé un drink virtuel…

° Et pour les équipes techniques ?

Nous multiplions les interventions à distance… Tout passe par le réseau. Un nouvel essor, je pense, pour le cloud ! L’une des principales leçons que nous pouvons d’ores et déjà tirer de la situation actuelle est que des pratiques de sécurité bien établies permettent aux services IT et aux entreprises de répondre de manière appropriée aux risques. L’impact de cette crise, pour nos équipes, est avant tout organisationnel, en raison de la distanciation sociale.

A flux tendus

° Quid chez vos clients ?

Pour de nombreuses organisations, les employés sont devenus presque tous distants du jour au lendemain. De là, de nombreuses complexités logistiques -telles que l’approvisionnement en licences logicielles supplémentaires ou la gestion des charges de trafic VPN. Il est essentiel de disposer d’une base de sécurité solide pour permettre des temps de réponse rapides, tout en réduisant efficacement l’exposition aux risques pour l’organisation. Et là, force est de constater qu’il y a des manquements….

° NTT est également un fournisseur d’éléments d’infrastructures. On parle de ruptures de stocks… Est-ce le cas ?

Plus de PC de stocks, en tout cas ! Rien avant six semaines, voire plus. On travaille à flux tendus, y compris pour les switchs. A première vue, 10 % des commandes ne seront pas honorées… IDC avait déjà anticipé une contraction des investissements IT, au sens large, à la mi-mars. Le cabinet de conseil confirme maintenant que la croissance de la demande sur les datacenters portée par le développement des services cloud ne suffira pas à sauver le marché des serveurs des effets de la pandémie…

Le parfait exemple du monde VUCA

° Qu’observez-vous dans le marché ?

Clairement, c’est la question de la solvabilité des entreprises et organisations qui est posée. Après le choc sanitaire, le choc économique. Le monde va connaître une profonde récession. Pour rebondir quand et comment ? L’allure que prendra la courbe de la reprise économique dépendra de l’évolution de la situation sanitaire dans le monde entier. L’épidémie évoluera différemment selon les pays. Les plus touchés auront tendance à se refermer, ce qui ne facilitera pas une reprise massive et uniforme.

° Quelles leçons, en qualité de dirigeant, en tirez-vous ?

Cette crise, même inédite, me renvoie quatre choses que nous savions, mais que nous préférions ignorer sur le monde dans lequel nous vivons : sa volatilité, son incertitude, sa complexité et son ambiguïté… sans doute par manque de courage. C’est le parfait exemple du monde VUCA ! Le Covid-19 et la tourmente humanitaire et économique qui l’accompagnent ont bouleversé le monde en moins de trois mois. Et personne, aujourd’hui, ne peut prédire la durée de cet événement…

(*) Pierre Dumont, Country Managing Director, NTT Belgium