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De l’urgence à recréer du lien

Déc 21, 2021 | Workplace | 0 commentaires

Les outils technologiques se sont révélés constituer des bouées de sauvetage pour notre économie, notre sécurité, notre santé. Mais il est grand temps de recréer du lien.

Créer du lien ne consiste pas seulement à connecter des parenthèses numériques, mais aussi -et surtout- à résonner entre personnes. Telle est une des conclusions de l’étude réalisée auprès de plus d’un millier de Belges à la demande de B-Tonic, filiale de l’assureur Baloise Insurance. Et pour cause : près de 56 % des travailleurs belges déclarent que leur travail est devenu plus pénible depuis la pandémie. Plus alarmant : quatre sur dix affirment qu’ils font bonne figure pour cacher leur stress et leur anxiété au travail. « Le bien-être au travail n’a jamais été autant nécessaire depuis la pandémie. Tant les travailleurs que leurs employeurs ont pris conscience de l’importance de la santé physique et mentale sur le lieu de travail », explique Siviglia Berto de B-Tonic, lors de la présentation du rapport « Tendances 2022 Bien-être et Connectivité » aux côtés de l’analyste des tendances Herman Konings.

Les événements de 2020 et 2021 ont fait entrer la technologie au plus profond de notre vie personnelle et de notre société. Il ne pouvait en être autrement. Les outils technologiques se sont révélés constituer des bouées de sauvetage importantes pour notre économie, notre sécurité, notre santé, notre bien-être mental. Aussi, il est intéressant de voir comment la numérisation a déferlé comme un tsunami et comment elle est perçue aujourd’hui.

En ligne, mais à quel prix ?

« BNIX, le gestionnaire de points d’interconnexion internet en Belgique, a vu le trafic internet augmenter de 40 % en un an, avec un pic de 600 Go par seconde lors de la seconde vague de contamination, rappelle Herman Konings. La pandémie a fait passer la numérisation et l’aspect de science-fiction du virtuel de leur phase d’engouement à un fait accompli. Les nouvelles technologies ont été louées avec euphorie… ou rejetées avec anxiété. »

La crise du coronavirus a impliqué la numérisation de la société et de l’économie à grande vitesse. Les plus petites entreprises qui, avant la pandémie, ne voyaient pas la nécessité de proposer leurs activités de marketing et commerciales en ligne ou d’automatiser les processus de traitement, n’ont pas eu d’autre choix que de s’y mettre pendant la crise. Être en ligne est devenu une condition sine qua non. Mais à quel prix ? « Notre vie trop remplie semble étouffer notre subconscient, et donc l’origine de notre créativité. Pour être heureux, ne devrions-nous pas exiger à nouveau un peu plus d’espace mental ? Et plus de lien ?»

Dans le monde, 35 % des consommateurs sont d’accord pour dire qu’une désintoxication numérique serait bénéfique à leur santé mentale, a chiffré Nielsen.

Interrompus cinq fois par heure

Dans cette quête de calme et de concentration, les bureaux paysagers et les espaces de travail colorés et joyeux inspirés par la Silicon Valley doivent être mis au rebut. C’est ce qu’estime un nombre toujours plus grand de biologistes comportementaux, architectes, ergonomes et psychologues. Le fabricant de meubles de bureau Steelcase a catalogué 32 % des bureaux belges comme ‘ouverts’ en 2019.

« C’est dramatique quand on sait que la productivité et l’ambiance conviviale et agréable entre collègues s’effondrent, commente Herman Konings. Les données de la Faculté d’Ergonomie de la Vrije Universiteit Brussel indiquent que les travailleurs intellectuels sont interrompus en moyenne cinq fois par heure, soit près de mille fois par mois. Lorsque la concentration et la créativité occupent une place centrale, on a surtout besoin d’un espace qui ne demande pas d’attention. On cherche le calme, avec des possibilités de détente saines et des tables de travail extra larges qui fonctionnent comme de grandes toiles blanches.

Parfois jusqu’à 11 heures par jour devant son écran

Lorsqu’on parle de « télétravail massif, à long terme et obligatoire », il faut compter qu’il touche entre 20 et 25 % de la population totale. 60 % des ouvriers d’usine et du personnel exécutant (employés de magasin, soignants, policiers, éboueurs, …) ont dû se rendre, le plus souvent ou toujours, physiquement sur leur lieu de travail en 2020. Les télétravailleurs européens sont restés devant leur écran bien plus longtemps, parfois jusqu’à 11 heures par jour, d’après ce que NordVPN Teams a appris de l’utilisation de réseaux privés virtuels (VPN). D’autre part, ils ont probablement pris des pauses déjeuner plus courtes, comme en témoigne l’absence de diminution significative de l’utilisation des VPN professionnels à midi. L’étude britannique de Hudson Weir le confirme : 54 % des collaborateurs déclarent prendre moins de pauses lorsqu’ils font du télétravail.

« La pérennisation du télétravail en tant que pilier de la nouvelle ou prochaine normalité ne dépend pas seulement des travailleurs concernés, mais surtout des employeurs. Ceux-ci ont pu constater pendant plus d’un an que le travail à domicile présentait également des avantages financiers notables. » Telenet, par exemple, a conclu une CCT qui donne au personnel, même après la crise, la possibilité de télétravailler jusqu’à maximum 60 % du temps de travail, partout dans l’Union européenne. L’opérateur a décidé de réduire ses espaces de bureaux. Unilever a également déclaré que « les travailleurs ne devront plus jamais venir cinq jours par semaine au bureau ».

Ce besoin de rencontres, de réunions éclairs… Du lien !

Un effet secondaire intéressant de la croissance exponentielle des systèmes numériques à la suite de la pandémie est ce que l’on pourrait appeler la fin de la « religion numérique ». Soit encore « la foi inébranlable dans la rédemption du mal par le numérique ». La « technologisation » n’est pas sans revers. La distanciation physique sociale n’est pas totalement compensée par les réseaux sociaux, les webinaires ou les téléconférences.

Toutes les générations ressentent un besoin nouveau de rencontres sincères et authentiques. Du lien ! L’interaction sociale réelle est un besoin de base qu’aucune pandémie ne peut annuler. « Les gens aiment la variété, souhaitent trouver un équilibre entre leur vie privée et leur vie professionnelle, veulent éviter de s’enfermer dans la routine de leur bulle privée et peuvent avoir l’esprit qui surchauffe à force de suivre des réunions sur des écrans de 15 pouces… avec des images trop petites et des tableaux illisibles. »

Empathie ? Vous avez dit empathie ?

L’importance socio-psychologique des conversations informelles, des réunions éclair en attendant l’ascenseur, voire des ragots, constitue également un argument valable pour soutenir, à l’avenir, le travail collaboratif dans un cadre physique. Les processus de co-création ont plus de chances d’aboutir dans un contexte physique que dans un vide virtuel. « Qu’en est-il du vent d’empathie qui, dans la nouvelle façon d’entreprendre axée sur les objectifs, a récemment vu le jour dans bien des départements HR ? Des entretiens de fonctionnement sur la peur de l’échec, le burn-out, le bore-out, les problèmes de communication avec les collègues… doivent-ils désormais se tenir dans le cyberespace ? Est-ce qu’une écoute à distance permet de faire preuve d’autant de compréhension et d’empathie et donc de lien ? »