Atos ciblé comme le principal obstacle au déploiement de la biométrie aux frontières de l’UE
L’ESS (European Social Survey) ne sera pas opérationnel avcant 2025, voire 2026. Quatrième report depuis le lancement du projet en 2019. Dans ce projet qui associe Leonardo, IBM et Atos, c’est ce dernier qui est montré du doigt.
En août passé, la commissaire européenne aux affaires intérieures, Ylva Johansson, avait prononcé un discours enflammé sur le lancement prochain d’un système de frontières « intelligentes » qui suivrait les mouvements de centaines de millions de voyageurs entrant et sortant de l’Union à l’aide des empreintes digitales et de la reconnaissance faciale. Lancement prévu le 10 novembre dernier. Il n’en a rien été. Et il n’en est toujours rien.
Quatrième retard
De source officielle, l’EES ne serait pas opérationnel avant 2025. Voire 2026 selon certains observateurs. C’est la quatrième fois que le projet est retardé en cinq ans. Et, selon la correspondance interne entre des responsables de l’UE et des sous-traitants consultée par Bloomberg et Lighthouse Reports, Atos en serait grandement responsable.
Atos, chargé de construire la majeure partie du matériel et des logiciels d’EES dans le cadre d’un contrat de 142 millions EUR attribué en 2019, a dû faire face à de nombreux défis, notamment des installations incomplètes, des équipements mal configurés et un personnel inexpérimenté. EU-Lisa, l’agence qui supervise les projets informatiques de grande envergure de l’UE, a signalé ces problèmes à plusieurs reprises, soulignant l’incapacité d’Atos à respecter des étapes critiques.
Une lettre de 2022 du directeur exécutif d’EU-Lisa, Krum Garkov, a cité les retards dans le déploiement des correctifs de bugs, le matériel manquant et les problèmes de transport comme emblématiques du dysfonctionnement du consortium. Des sources internes ont corroboré qu’Atos était le principal responsable de ces échecs, deux responsables de l’UE notant que l’entreprise avait sous-estimé la complexité du projet.
Inquiétudes des Etats membres
Les retards ont déjà eu des répercussions. Frontex, l’agence européenne de gestion des frontières, a dû réaffecter 130 membres du personnel qui étaient censés travailler sur le système européen d’information et d’autorisation de voyage (ETIAS), une initiative d’exemption de visa de 200 millions EUR reposant sur la technologie d’EES. Les États membres ont également exprimé leurs inquiétudes quant à l’état de préparation du système ; la France, l’Allemagne et les Pays-Bas s’étaient officiellement opposés au lancement le 10 novembre dernier.
Cette mauvaise gestion de la part d’Atos et de ses partenaires du consortium, IBM et Leonardo SpA, soulève des questions sur la capacité de l’UE à mettre en œuvre ce système complexe.