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Les câbles sous-marins menacés
On compterait un demi-millier de réseaux de câbles sous-marins. Leur vulnérabilité est réelle, pointe l’Uptime Institute. Plus encore dans le contexte géo-politique actuel.
L’Uptime Institute voit aujourd’hui deux menaces pour nos data centers : la non-disponibilité de semi-conducteurs et la vulnérabilité des câbles sous-marins à fibre optique. La première est davantage liée aux conséquences de la pandémie de COVID-19 -et la perturbation subséquente des chaînes d’approvisionnement. En effet, la grande variété d’équipements électriques et mécaniques souvent complexes impliqués dans les data centers a exacerbé les problèmes de chaîne d’approvisionnement. Aujourd’hui encore, les pénuries de composants apparemment ordinaires, tels que les régulateurs de tension, les filtres à air, les vannes ou les bornes de batterie, peuvent entraîner des retards de livraison importants. Comme le note l’Uptime Institute, la fin de la pandémie ne signifie pas un retour à la normalité des années précédentes, car une forte demande refoulée, des coûts plus élevés et des délais anormalement longs persistent.
Les câbles sous-marins, cibles de grande valeur
Il existe aujourd’hui un risque plus… profond. Comme pour les semi-conducteurs, ce n’est en aucun cas un problème nouveau. Cependant, les tensions géopolitiques croissantes soulèvent des questions quant à la probabilité que des États souverains se livrent à des actes de sabotage.
Les réseaux de fibre optique sous-marins se composent de centaines de câbles sous-marins qui transportent la quasi-totalité du trafic de données intercontinental, soutenant des milliards de dollars d’activité économique mondiale. Il existe actuellement plus de 500 réseaux internationaux et nationaux en activité, qui sont détenus et exploités -presque exclusivement- par des entreprises privées.
« Certains câbles sous-marins représentent des cibles de grande valeur pour certains acteurs ; ils sont attractifs car ils peuvent être endommagés ou rompus dans le secret et sans le contrecoup d’une attaque traditionnelle, note Daniel Bizo, Research Director, Uptime Institute. La plupart des ruptures de câbles sous-marins n’entraînent pas de pannes généralisées. En règle générale, le trafic peut être réacheminé via d’autres câbles, mais au prix d’une latence croissante. Mais lorsque plusieurs lignes sont coupées simultanément dans la même région -ce qui compromet la diversité des trajets-, l’effet peut être nettement plus important… »
Dans un contexte de guerre hybride
En 2006, un tremblement de terre majeur -avec de multiples répliques- dans le détroit de Luzon, entre Taïwan et les Philippines, a entraîné la mise hors ligne de sept des neuf câbles sous-marins. Cela a provoqué des pannes graves et généralisées dans la région Asie-Pacifique, perturbant considérablement les entreprises et les consommateurs à Hong Kong, au Japon, à Singapour, en Corée du Sud et à Taïwan. La réparation de ces connexions réseau vitales a finalement impliqué plus de 40 % de la flotte mondiale de réparation de câbles. La restauration complète des services n’a été achevée que… sept semaines après la panne initiale !
« Les câbles sont également vulnérables aux activités humaines, qu’elles soient accidentelles ou délibérées, souligne Daniel Bizo. Si les navires sont la cause la plus fréquente, car les équipements de pêche ou les ancres peuvent attraper un câble et l’endommager, les acteurs étatiques malveillants constituent également une menace. En 2014, alors que la Russie occupait la péninsule de Crimée, des individus non identifiés ont saisi des nœuds de télécommunications et détruit des câbles terrestres. La même chose pourrait arriver aux câbles sous-marins… »
Une protection particulièrement difficile
De tels actes de sabotage entrent dans la catégorie des guerres hybrides. Il est peu probable qu’une telle attaque déclenche un conflit mais, si elle est coordonnée avec succès, elle causerait de graves perturbations.
Se protéger contre de telles menaces -et détecter et surveiller les menaces potentielles, ou identifier les responsables lorsque des attaques se produisent – est difficile, en particulier en ce qui concerne les câbles sous-marins.
« Ne nous leurrons pas : l’emplacement de ces câbles étant dans le domaine public et le droit international interdisant l’arraisonnement de navires étrangers dans les eaux internationales, la protection de ces installations vitales est particulièrement difficile. Taïwan, en tant qu’île, est particulièrement vulnérable aux attaques sur ses câbles sous-marins… »