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L’essor du cloud tient au… management
Souvent, les discussions sur le cloud butent au niveau du management. Pour Phil Le-Brun, Entreprise Strategist, AWS, il faut sortir du «piège organisationnel».
«L’essor du cloud tient au management. Dans de nombreux cas, quand ça coince, il faut voir au niveau organisationnel. En cause, les activités de maintenance, la bureaucratie, les silos et, surtout, la complexité organisationnelle !»
Pour Phil Le-Brun, Entreprise Strategist, AWS, «nous faisons face aujourd’hui à une problématique : les discussions sur le cloud, l’agilité et la transformation numérique masquent l’écart croissant entre la vitesse du monde extérieur et la vitesse à l’intérieur des organisations. C’est ce qu’on appelle l’écart de valeur.»
Frederick Taylor et les silos
En d’autres termes, les organisations commencent à être en concurrence avec elles-mêmes. Il en résulte davantage de complexité. Davantage de réunions, aussi, en particulier dans les domaines d’activité caractérisés par l’incertitude et les changements externes rapides. Cela perpétue la loi de Conway, qui conduit à une complexité technologique accrue. «La valeur est perdue; les employés deviennent frustrés, illustre Phil Le-Brun. En 2015, McDonald’s s’est en partie attaqué à ce problème en simplifiant la structure organisationnelle mondiale. Il ne s’agissait pas d’un plan de réduction des coûts, mais plutôt d’un plan visant à réduire le temps de décision et à financer l’accélération des initiatives clés.»
Les problématiques de management remontent à la révolution industrielle. Au Taylorisme, aussi, qui a généré une nouvelle «classe de managers» en charge de la planification et des améliorations. «Cette approche fait aujourd’hui partie intégrante du management des entreprises. Le travail est divisé en silos, les objectifs de performance sont fixés de façon individuelle. Les décideurs et les ‘exécutants’ sont séparés et des processus sont mis en place pour contrôler le travail des employés.»
Lean, Gemba
A entendre Phil Le-Brun, les managers peuvent jouer un rôle en reliant la stratégie à l’exécution, en facilitant la communication et en encadrant les équipes. Cependant, dans de nombreuses organisations, ils diluent la responsabilité et l’agilité. Ils sont trop normatifs, privant les équipes de leur autonomie, renforçant les silos existants. Il ne s’agit pas d’un problème d’employés, mais d’un problème d’organisation.
«Il est temps d’adresser cette problématique. Mettons de côté les secteurs de l’entreprise qui bénéficient de l’efficacité et de la prévisibilité. Concentrons-nous sur ceux qui ont besoin d’agilité. La plupart des équipes technologiques ont besoin d’une plus grande proportion d’ingénieurs, motivés et reconnus. Que voulons-nous sinon embaucher les meilleurs talents possibles qui veulent intrinsèquement faire du bon travail. Aussi, créons les bonnes conditions pour que ces personnes puissent réussir. Nous prospérons en maximisant le temps et l’énergie que nos talents consacrent à ce que les praticiens du Lean appellent le ‘gemba‘. Soit l’endroit où la valeur est créée. Pour une dynamique organisationnelle saine, il faut davantage d’interventions comportementales et moins de gestion du travail lui-même.»
Bref, au lieu de cantonner les personnes très performantes dans des rôles de gestion traditionnels, nous pouvons les repositionner dans des rôles clés, générateurs de valeur.
Action rapide
«Il est possible de réorienter les talents d’une entreprise par le biais de processus traditionnels, assure Phil Le-Brun. Pour beaucoup, la promotion à un poste de direction est vue comme une étape incontournable pour faire progresser sa carrière. Et non comme une étape naturelle valorisant la maîtrise et l’expérience d’un employé. De récentes études indiquent que près de deux tiers des Européens ne souhaitent pas devenir manager. C’est intéressant. Ces employés, en effet, jouent un double rôle de coach-artisan. Ils se révèlent exceller dans leur travail et sont très engagés. Ils maîtrisent leur métier tout en donnant d’excellents conseils sur les performances, les plans de développement et les questions complexes à leurs collègues.»
Dans un article de blog précédent, Phil Le-Brun a partagé son point de vue sur ce que le fait d’être impliqué dans tout, mais responsable de rien, fait à la motivation et à la productivité. Et d’aborder l’idée d’une équipe d’action rapide. Soit une équipe agile plus transitoire qui avait la responsabilité de bout en bout d’une initiative clé.
Créer de la valeur, tant que c’est nécessaire
Les individus qui dirigent ces équipes font exactement cela : diriger, pas gérer. Dans de nombreuses organisations, la majeure partie de ces rôles sera celle de Product Owners ou du CCoE (Cloud Center of Excellence). Ils sont motivés par la création de valeur, mais reconnaissent également quand leur rôle n’est plus nécessaire. De cette façon, l’organisation ne prend pas l’habitude de construire des empires provoquant des goulots d’étranglement.
«Un autre rôle est celui de responsable de processus. J’ai discuté l’année dernière avec un client, frustré par le fait que plusieurs silos organisationnels optimisaient leur part du processus de la chaîne d’approvisionnement, mais que, pourtant, l’efficacité globale ne s’améliorait pas. C’est un processus sériel. La nomination d’un responsable de processus permet d’appliquer les techniques Lean. Et d’éliminer les goulots d’étranglement, optimisant ainsi l’ensemble du processus.»
Chefs de sections, Scrum masters…
Dans les équipes autonomes et axées sur les résultats, le micro-management est paralysant. Au lieu d’appliquer ce type de management, les managers ‘coachs’ puisent dans leur expérience et leur apprentissage continu pour aider les équipes. Ils apportent des conseils, font des retours et endossent un rôle de formateur. Ils se concentrent sur l’accompagnement comportemental plutôt que sur la gestion des tâches, favorisant un environnement dans lequel chacun contribue et s’investit pleinement dans son travail.
Dans certaines organisations, ces personnes sont les chefs de section. Dans d’autres, ils peuvent être le Scrum master, souvent capables de coacher et de s’engager dans le ‘vrai‘ travail. L’étendue de contrôle d’un coach-leader compétent peut largement dépasser les six à sept rapports directs souvent attendus des managers. Cette portée élargie permet d’éviter une tendance à dériver vers des comportements de commandement et de contrôle et fournit le soutien dont les équipes ont besoin pour prendre des décisions.
Entre planification et agilité
Les managers expérimentés peuvent être parfois perçus comme des freins au changement, constate Phil Le-Brun. Pourtant, au sein de leur entreprise, ils en sont souvent les doyens de la culture. Ils en maitrisent l’organisation informelle et sont considérés par les autres employés comme des personnes de confiance. Alors que les transformations numériques nécessitent un soutien de la part de la direction, ces managers expérimentés peuvent être recrutés dans le cadre d’une équipe en charge de faire évoluer l’entreprise. Ces avant-gardes du changement peuvent apprendre de nouvelles techniques et aider à enseigner, légitimer et intégrer ces nouveaux processus dans les organisations.
Peu d’organisations, voire aucune, sont à 100 % agiles ou bureaucratiques. Les entreprises agiles ont besoin d’individus capables de faire le lien entre ceux qui considèrent la planification comme la solution et ceux qui croient en l’agilité. En collaborant, ces employés peuvent appliquer différentes méthodes de travail, pour développer et transformer les façons de travailler.
Leadership, l’action plutôt que le titre
Ces personnes proactives et investies savent que les organisations sont des systèmes adaptatifs complexes, en raison de leurs diverses expériences professionnelles. Grâce aux relations établies et à leurs succès passés, ils peuvent exercer une influence au-delà de leur cercle restreint et de leur entreprise.
«L’adoption de l’agilité exige d’avoir davantage d’employés leaders que de managers. Par définition, le leadership est la façon dont une personne agit, plutôt qu’un titre, estime encore Phil Le-Brun. La frontière entre le leadership et les employés s’estompe avec le temps, et les entreprises agiles sont susceptibles d’avoir besoin de plus de leaders.» Ces derniers peuvent favoriser la création de groupes d’experts ou se positionner comme les responsables de la prise d’initiatives au sein de l’organisation. Ils héritent ainsi des attributs des autres rôles de managers susmentionnés : ils disposent notamment d’une vision claire, et attachent une attention particulière sur les résultats et le développement des collaborateurs.
Libérer le potentiel des leaders
«Pour moi, continue Phil Le-Brun, il est primordial d’examiner attentivement les descriptions de poste et d’envisager toutes les options». Est-il possible de créer une filière technique pour les personnes dont le statut est équivalent à celui des cadres, mais qui ont une expertise d’artisans ? Ou encore de responsabiliser ces employés en les sollicitant dans la prise d’initiative ? Avant de recruter un manager ou d’en remplacer un au sein d’une équipe, il est crucial de savoir ce que l’on attend de lui, et d’anticiper les éventuels problèmes en interne. Au même titre, si les projets ne sont pas toujours sur la bonne voie, il est important de faire preuve de compréhension et d’agilité.
Ces changements demandent du cran car ils bouleversent les codes du management traditionnel. «En retour, conclut Phil Le-Brun, ces leaders se développeront rapidement sans être soumis à des évaluations arbitraires, effectuées une fois par an et biaisée la plupart du temps. Il est important de libérer le véritable potentiel de ces employés en tant que leaders et force de proposition. Cette stratégie et cette culture permettra aux entreprises de combler l’écart de valeur, quel que soit leur secteur d’activité.»