Artificial Intelligence
Artificial Intelligence, Deep Learning, Machine Learning
L’IA aux frontières de l’humain. Jusqu’où ?
L’IA, révolution humaine ou technologique ? Sam Desimpel, de Top Tier Access, aborde la question sous l’angle de l’investisseur. Surprenant !
« L’IA ne remplacera jamais les humains parce qu’elle ne peut faire preuve d’empathie ! Pour nous, investisseurs, c’est la même chose : une IA peut aider à trouver les bonnes entreprises dans lesquelles investir, mais on aura toujours besoin d’un clic humain pour parvenir à un investissement. »
Tel est l’avis de Sam Desimpel, Managing Partner, Top Tier Access. Son entreprise est un fonds de fonds ciblant les Belges fortunés pour co-investir dans de grands fonds internationaux de capital-investissement. Cette stratégie lui permet de réduire ses coûts de gestion. Top Tier Access compte aujourd’hui dans son portefeuille des fonds provenant d’acteurs renommés tels que BC Partners, EQT, CVC, HIG Capital et Apax Partners. L’entreprise, localisée avenue Louise à Bruxelles, a été fondée en 2020 par Joel Sandhu et Sam Desimpel. Depuis, elle a levé des fonds à deux reprises : 40 et 100 millions EUR. Et comme nombre de grands investisseurs, Top Tier Access s’intéresse beaucoup à l’intelligence artificielle, au potentiel financier de l’IA
Rien qu’en 2020, 75 milliards USD ont été investis dans des entreprises d’IA, dont 80 % environ en Chine et aux États-Unis. Pour Sam Desimpel, l’Europe est clairement à la traîne et devrait réfléchir à cette question de manière beaucoup plus stratégique. Ce qui veut dire pousser les initiatives, les projets. Un ChatGPT « made in Europe », oui, pourquoi pas ? Pourquoi, surtout, ne considérer que l’innovation nord-américaine ?
Clare m’a appelé, très humaine…
Et de citer la pépite berlinoise clare&me. « Vous vous sentez anxieux, ou déprimé ? Appelez Clare, l’IA de Clare&me ; appelez-la depuis WhatsApp. Elle vous écoutera en fonction de ce que vous dites, en fonction aussi de la manière dont vous le dites -ton, vitesse des mots, volume des paroles… Elle vous posera des questions et essaiera de vous calmer ! »
La mission de clare&me n’est pas de remplacer la psychothérapie traditionnelle, mais de fournir un canal entièrement nouveau et accessible pour la thérapie cognitivo-comportementale, disponible à tout moment et en tout lieu en un clic. Plutôt qu’une dissuasion, Emilia Theye, psychologue et cofondatrice de l’entreprise, insiste sur le fait que l’utilisation de l’IA devrait être considérée comme un USP (Unique Selling Proposition). « C’est la proposition de valeur de clare&me parce que notre groupe cible ne veut pas parler à un humain, il veut avoir quelque chose de plus anonyme et sans jugement qu’une interaction humaine. Ce que nous essayons de faire, c’est de relâcher la pression sur un système en créant d’autres médias que les gens peuvent utiliser… » La plate-forme est conçue pour « se sentir humain » et pour proposer des approches cliniquement prouvées de la thérapie comportementale -offrant un soutien psychologique abordable, quel que soit le lieu et le moment.
clare&me est donc un compagnon anonyme et sans jugement offrant un soutien psychologique 24h/24 via des conversations verbales sur smartphone. Ses promoteurs insistent parlent d’interactions altruistes et éthiques qui font tomber les barrières élevées à la thérapie traditionnelle pour contrer les goulots d’étranglement importants dans la capacité de traitement.
« Clare m’a effectivement appelé, confie Sam Desimpel. Et je peux vous assurer qu’elle avait l’air très humaine. Rien d’un robot. Même les choses humaines les plus intimes, comme l’écoute, peuvent désormais être réalisées par l’IA… »
C’est par la répétition et l’imitation qu’une IA fonctionne
Une IA peut aider à analyser les symptômes d’une maladie, mais un humain voudra toujours entendre les résultats d’un médecin, estime Sam Desimpel. En d’autres termes, l’IA peut penser, mais pas ressentir. L’IA a un QI, mais pas de QE. L’IA n’est pas empathique, elle ne peut pas éprouver de sentiments. Bien que…
Selon le futurologue Ray Kurzweil, les machines intelligentes prendront le pouvoir sur l’Homme en 2029. Et de désigner ce moment « ère de la singularité ». L’Homme, alors, devenant… inutile. Selon d’autres voix, considérer les algorithmes à travers l’unique prisme d’une menace ou d’une déshumanisation se révèle être une erreur d’attribution qui nous limite dans notre capacité à les comprendre comme catalyseur du potentiel et des synergies humaines. Dans le fond, les technologies ne changent pas réellement les sociétés : c’est leur réappropriation par l’Homme qui permet d’en faire de réelles évolutions. Cette fine nuance permet d’envisager la place centrale de chacun dans la construction d’un futur souhaité, où l’emportent les applications bénéfiques de l’IA.
Clare est un bon exemple. C’est par la répétition et l’imitation qu’elle fonctionne. « Si j’entends suffisamment de personnes déprimées, je comprends assez vite si l’humain en face de moi est heureux ou déprimé. Et quand on le sait, il n’y a plus qu’un nombre limité de questions que l’on peut poser. Il n’y a qu’un nombre limité de tons pour poser ces questions », explique Sam Desimpel.
Une IA est particulièrement douée pour les choses répétitives. Il n’y a donc rien qu’une bonne IA ne puisse faire. « Une IA ne sera probablement jamais capable de ressentir pour elle-même, mais elle peut savoir ce que vous ressentez pour vous-même et d’en tirer les conclusions logiques qui s’imposent. Merci Clare ! »
Motherbrain, l’IA au sein du comité d’investissement !
Autre exemple, Motherbrain de la société suédoise EQT, dans laquelle Top Tier Access détient un certain nombre de fonds de fonds. « EQT a toujours été un précurseur et un innovateur. Son IA recherche dans les bases de données et sur Internet les entreprises qui se développent rapidement. Publiez-vous beaucoup d’offres d’emploi en ligne, votre entreprise fait-elle l’objet d’une recherche intensive sur Google ? Motherbrain le sait, rien ne lui échappe ! »
Née en 2016, Motherbrain permet à EQT Ventures d’être véritablement axé sur les données pour trouver les meilleures start-ups technologiques dans lesquelles investir. Sa force ? sa puissance de calcul. Et comme des milliers de nouvelles start-ups sont créées chaque jour, aucun humain ne peut toutes les évaluer… Concrètement, Motherbrain utilise des convNet (Convolutional Neural Networks), la forme la plus populaire d’apprentissage automatique, pour examiner les données de séries chronologiques sur les entreprises afin d’aider à déterminer où l’entreprise devrait investir.
L’IA prend en charge le suivi des cycles de vie des entreprises plutôt que les cycles de vie des transactions, se terminant à la sortie d’un fonds. En visualisant et en rendant les données accessibles, en s’appuyant sur une mémoire d’entreprise commune et des algorithmes formés collectivement, elle crée des avantages concurrentiels structurels permettant à EQT de prendre des décisions plus rapides et plus étayées. Aujourd’hui, Motherbrain a sa place au sein du comité des investisseurs !
Les entreprises financées par du capital-risque restent privées de plus en plus longtemps
Le choix de G-Squared, qui a investi dans la roumaine UIPath, est tout aussi intéressant. L’IA d’UIPath automatise les back-offices des entreprises, remplaçant, entre autres, la saisie manuelle des données comptables et autres processus de saisie de données répétitifs qui étaient auparavant effectués par un humain. L’entreprise est désormais cotée en bourse.
Sam Desimpel voit G Squared comme un modèle : ce gestionnaire mondial de fonds de capital-risque sert de fournisseur de capital de transition à ses sociétés de portefeuille. Fondée en 2011, G Squared s’aligne sur un changement fondamental : les entreprises financées par du capital-risque restent privées de plus en plus longtemps. Par conséquent, ces entreprises ont besoin à la fois de capitaux primaires pour financer leur croissance continue et de capitaux de transition pour fournir des liquidités aux premiers investisseurs, aux employés actuels et anciens et aux autres actionnaires. Avec UiPath, G Squared mise sur le long terme. L’éditeur de logiciels d’automatisation d’entreprise vient d’être nommé leader dans The Forrester Wave : Robotic Process Automation, Q1 2023. L’entreprise a reçu le score le plus élevé dans chacune des trois catégories parmi les 15 fournisseurs évalués : offre actuelle, stratégie et présence sur le marché.
Le rapport indique : « UiPath convient parfaitement aux organisations ayant pour priorité la RPA et l’ambition de s’étendre vers une automatisation d’entreprise plus large à mesure qu’elles acquièrent de l’expérience ». Le rapport note également : « UiPath donne la priorité à l’automatisation d’entreprise avec une offre de plate-forme supérieure… » Aujourd’hui, UiPath n’est pas seulement le plus grand fournisseur de logiciels RPA en termes de revenus, mais il est également passé d’un pur jeu RPA à ce qu’il appelle une plate-forme d’automatisation commerciale. Au cours des dernières années, il a ajouté des fonctionnalités telles que l’exploration de processus, le traitement intelligent des documents, l’intégration d’API et le développement d’applications low-code à son produit, le transformant ainsi en une plate-forme d’automatisation.
L’heure des choix
Pour les investisseurs de Top Tier Access, les débats ne doivent donc plus s’attarder à une dualité entre les Hommes et l’IA. Qu’on le veuille ou non, la prévalence des algorithmes croît de manière exponentielle. Une réflexion plus stimulante est de s’interroger sur la place que l’on veut avoir dans la définition du monde de demain : rester passif et tolérer un monde décidé par d’autres ou être proactif dans la co-construction d’un monde souhaité ?