L’impression 3D en route vers la production de masse
L’impression 3D à un point d’inflexion, la production devient rentable. Si, aujourd’hui, la «mass customization» attire l’essentiel de l’industrie, le break even va prochainement franchir le seuil du million de pièces. De là, de nouveaux horizons.
L’impression 3D sort de ses premières applications -le prototypage, les petites séries, la fabrication d’outillage- pour aller vers la production effective, voire la production de masse. «C’est un changement radical, commente Dirk Slachmuylder, Managing Director, HP Inc. Belgium & Luxembourg. Au début, nous pensions que le marché professionnel de l’impression 3D allait être porté par les impressions unitaires, hors d’une logique de production en série. Le but ultime, désormais, est de produire des pièces finales. Et de les rendre meilleur marché. Au début, le break even était de 50.000 pièces. Nous sommes passé assez vite à 100.000 pièces. Prochainement, on franchira le seuil million…»
Le marché de l’impression 3D progresse à vive allure, même s’il est encore concentré sur les centres de service. On en compte 150 au monde; il y en aura dix fois plus à court terme. «En Belgique, en particulier, HP a vendu vingt systèmes de production au cours des vingt quatre derniers mois. Le centre de services Ziggzagg de Aalter et Materialise sont deux exemples de clients avec lesquels nous développons et renforçons davantage encore notre collaboration. Et ce n’est qu’un début. En quatre trimestres, HP Belgium-Luxembourg est devenu l’un des premiers fournisseurs d’imprimantes 3D sur son territoire !»
Surtout, le marché évolue. «A nos débuts, voici deux ans donc, nous visions le prototypage. Désormais, ce sont les produits finaux. Déjà, 50% des pièces aujourd’hui imprimées concernent des produits finaux…» Tout aussi décisive, l’accélération que permet désormais l’impression additive : voici peu, du prototypage à la production, il fallait souvent six mois; aujourd’hui, de la conception à la production en passant par le prototypage, il suffit de 72 heures ! Encore centrée sur la production de pièces en plastique, l’impression 3D va s’ouvrir au métal. Elle permettra de simplifier sensiblement les process de production de petites et moyennes séries, d’éviter notamment les étapes d’assemblage -ce qui réduit les risques, mais aussi les coûts.
Aujourd’hui, priorité à la «mass customization»
D’ici 2020, 75 % des opérations de production industrielle dans le monde pourraient mettre à profit des outils d’impression 3D pour la fabrication de produits finis, a chiffré Deloitte. Et de constater que le design automobile, l’impression rapide de prototypes et l’impression de pièces destinées à l’aérospatial ou à la défense représentent d’ores et déjà les plus gros segments. Parmi les marchés de niche, l’impression d’implants dentaires ou d’appareils médicaux. En Belgique, une entreprise s’illustre dans la production de semelles orthopédiques…
Aujourd’hui, l’industrie privilégie la «mass customization», dont le but est de produire en série mais sur mesure. Loin d’être antagonique, ces deux termes représentent très bien ce que propose la fabrication additive. «Le consommateur veut être acteur de son produit et le co-produire avec les marques. L’industrie automobile, en particulier, est en train de saisir cette opportunité. En co-concevant le produit, le consommateur est plus impliqué dans sa réalisation. L’objet final correspond à ses besoins et ses désirs, et le degré de satisfaction n’en est que plus élevé…»
Production numérique à la demande
L’impression 3D va révolutionner l’industrie, assurent les analystes. Elle va considérablement réduire les chaînes d’approvisionnement. Du coup, libérés des contraintes des usines à l’étranger, les fabricants vont se rapprocher physiquement du consommateur, ce qui va raccourcir les chaînes d’approvisionnement et favoriser cette nouvelle capacité de tout personnaliser, n’importe quand et n’importe où. «Tout comme l’impression numérique à la demande a permis aux entreprises d’imprimer uniquement ce dont elles ont besoin, quand et où elles le souhaitent, l’impression 3D va permettre aux entreprises de numériser la production, de réduire ou de faire disparaître les stocks physiques et de mettre en œuvre des modèles de livraison localisés, à la demande et en juste à temps. La production numérique à la demande permet aux entreprises de mieux adapter l’offre à la demande en maintenant des stocks virtuels infinis de produits et de pièces de rechange plutôt que de fabriquer des matériaux qui doivent être stockés physiquement pour une utilisation ultérieure ou, pis, pour ne jamais être utilisés…»
La fabrication 3D promet aussi de nombreux avantages dans un contexte de développement durable, insiste Dirk Slachmuylder. «Les procédés de fabrication classiques peuvent occasionner un gaspillage de matière parfois très important, alors que les procédés de fabrication 3D les plus répandus ne produisent presque aucun déchet. On produit uniquement ce qui est nécessaire. Bref, pas de gaspillage, pas d’entreposage !»
Les produits peuvent être pensés en fonction des besoins de l’utilisateur plutôt que des limites liées à la fabrication de masse. Les prototypes peuvent être fabriqués sur place, par la même équipe. De là, des économies de temps et de transport. Enfin, les erreurs de conception peuvent être détectées avant la production à grande échelle.
«Il faut inciter les industriels à commencer par des petites séries, puis à augmenter progressivement leur production, mais aussi les inviter à penser autrement et créer de nouveaux produits grâce aux possibilités de l’impression 3D.»
Impression 3D et intelligence artificielle
L’impression 3D a accompli des progrès très importants ces dernières années, permettant par exemple de créer des objets complexes mêlant parfois différents matériaux, de travailler avec du verre en fusion, d’entrevoir la possibilité de produire des os artificiels et même de fabriquer un réacteur d’avion.
Dans ce marché, au potentiel sous-estimé, HP entend bien préserver sa place de leader. «Nous sommes en train d’imaginer comment optimiser l’impression au départ de l’intelligence artificielle, complète Dirk Slachmuylder. Dans un processus de production, cette intelligence peut contrôler la qualité des fichiers de fabrication assistée par ordinateur, recommander des matériaux et identifier les failles à partir des réponses à un questionnaire spécifique et ainsi d’éviter les nombreuses itérations avant de lancer la production…»