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Sobriété numérique : réaliste ou voeu pieux ?
Le numérique émet aujourd’hui 50 % de gaz à effet de serre de plus que le trafic aérien ! Il est grand temps de basculer dans l’ère de la sobriété numérique.
Sobriété numérique : réaliste ou voeu pieux ? Si le numérique est souvent présenté comme une solution pour la transition écologique, le compte n’y est pas. Son impact carbone augmenterait de 9 % par an. Si nous continuons à ce rythme, la consommation d’énergie sera trois fois plus importante en 2025 qu’elle ne l’était en 2005. C’est l’inverse de ce qu’il faut faire pour tenir nos objectifs climatiques. D’où la nécessité, pour le think tank The Shift Project, de basculer dans l’ère de la sobriété numérique.
Une grande partie de la consommation d’énergie est due à la production des équipements. C’est là une des faces cachées du numérique. Et non la moindre. Le numérique émet aujourd’hui 50 % de gaz à effet de serre de plus que le trafic aérien. Si rien n’est fait pour inverser la tendance, ses émissions seront en 2025 au même niveau que celles de l’automobile aujourd’hui.
La production des équipements numériques est responsable de 40 % de l’empreinte carbone du numérique. Si l’on additionne les émissions liées à la production et à l’utilisation, les terminaux sont responsables de 60 % de l’empreinte carbone totale. Plus un terminal est petit, plus l’empreinte due à sa production est importante.
Passer d’un numérique instinctif à un numérique réfléchi
Le numérique est à la fois outil et défi pour la transition carbone. Les opportunités qu’il propose sont réelles, mais soumises aux mêmes contraintes que le reste de nos systèmes. Il est donc de notre ressort et de notre responsabilité de choisir les directions à donner à nos usages. Nous devons en garantir la résilience et la pérennité. «La sobriété numérique, explique le think tank, c’est passer d’un numérique instinctif, voire compulsif, à un numérique réfléchi. C’est-à-dire un numérique qui sait choisir ses directions : au vu des opportunités, mais également au vu des risques.»
Cette sobriété, encore floue aujourd’hui, sera nécessaire. L’ensemble des données stockées dans les data centers augmente de 36 % par an. Et 40 % de cette progression est liée au big data. Sur les réseaux sociaux, 80 % de l’augmentation du trafic est due aux applications vidéo, principalement de loisir.
Une méthodologie de calcul
Depuis quelques années, la croissance des volumes est largement supérieure aux gains d’efficacité énergétique. Demain, nous aurons à faire face à une accélération de la consommation d’énergie due au numérique. Pour The Shift Project, «la seule manière de renouer avec une trajectoire soutenable est de revenir à plus de sobriété. Retrouvons, par exemple, une croissance de trafic de l’ordre de 15 % par an, au lieu de 25 % par an.»
Dans son nouveau rapport, The Shift Project développe une méthodologie de calcul des bénéfices / coûts environnementaux ainsi qu’un guide pour repenser les systèmes d’information. Le think tank la propose tant aux acteurs publics que privés.
Plutôt que limiter l’évaluation à l’impact immédiat, la proposition est de prendre en considération le coût de déploiement (environnemental, énergétique, carbone, en termes de besoin de maintenance et donc de formation et d’intrants extérieurs…). Seule une quantification globale permet de mettre en regard de manière objective le coût énergétique et carbone d’une solution avec la réduction qu’elle permet.
Piloter nos choix numériques
Le calcul doit tenir compte des paramètres essentiels que sont le coût énergétique de production des composants de la couche connectée, la durée de vie des dispositifs, la consommation électrique associée au fonctionnement des dispositifs numérique, l’économie d’énergie permise par l’introduction de la couche numérique et d’éventuels paramètres pouvant influer sur ces économies d’énergie
«Déployer la sobriété numérique, c’est piloter nos choix technologiques, les déploiements d’infrastructures et d’usages associés afin de préserver les apports essentiels du numérique», insiste The Shift Project.
Pour réussir, le think tank propose trois pistes soutenues par une méthodologie et un guide de pilotage. Un : l’évaluation en situation de la pertinence environnementale doit être systématique -en termes de cycle de vie, mais aussi de bilans prévisionnels environnementaux (fabrication, usage, fin de vie). Deux : une reprise en main du pilotage des systèmes d’information afin d’intégrer la dimension environnementale dans le pilotage stratégique et opérationnel. Et trois : l’organisation d’une discussion autour de la sobriété numérique pour objectiver les débats de société qui s’enclenchent autour de nos choix technologiques collectifs.