Nécessité hier, le travail hybride finira-t-il par s’imposer ?
Flexibilité ou retour au bureau quasi forcé ? Malgré les annonces tonitruantes de certaines grandes entreprises en faveur du « back office », la question ne sera pas tranchée en 2025. Et c’est heureux.
« J’ai l’impression que de nombreux cadres supérieurs assimilent la productivité à la présence physique au bureau, mais cela ne reflète tout simplement pas la façon dont les salariés donnent le meilleur d’eux-mêmes, assure Bianca Stringuini, Global head of Diversity, Equity & Inclusion, Hays. Les organisations devraient plutôt veiller à ce que la productivité soit leur ligne directrice, en donnant aux employés les moyens de prendre des décisions basées sur leurs performances les plus efficaces. »
Alors, retour au bureau ou pas ? Il n’est pas sûr que la question soit tranchée en 2025, pronostiquent les observateurs. KPMG et PwC, par exemple, avancent des tendances et avis contradictoires. Ainsi, un récent rapport de KPMG révélait que 79 % des chefs d’entreprise interrogés affirment que le travail à distance aura disparu avant trois ans. 86 % d’entre eux ont déclaré qu’ils récompenseraient les employés au bureau par des affectations, des augmentations et des promotions. Cela suggère qu’ils ont l’intention de ne pas accorder ces mêmes avantages aux employés qui choisissent de travailler à domicile.
Contraste entre réglementation et réalité
« L’idée selon laquelle il est nécessaire d’être au bureau toute la journée, tous les jours, pour établir et maintenir une culture forte est un mythe », concluait pour sa part PwC dans un rapport -publié à quelques semaines d’intervalle- qui conseille plutôt aux dirigeants d’entreprises « d’offrir des options flexibles aux employés. » Ici comme là, le tableau ravive le débat sur la comparaison de la productivité des employés en télétravail et au bureau.
Il existe un contraste entre la réglementation et la réalité, observe Bianca Stringuini. « Au Royaume-Uni, le droit au travail flexible est désormais la norme dès le premier jour dans le cadre du paquet de droits des travailleurs. En Chine, les travailleurs peuvent répartir un nombre fixe d’heures par jour/semaine sur des horaires irréguliers. Le Portugal est considéré comme un pionnier du travail flexible, les parents ayant droit au télétravail… sans avoir à négocier avec leur employeur. »
La flexibilité n’était pas un critère négociable
Au cours des quatre dernières années, notre façon de travailler a radicalement changé. Le travail hybride s’est avéré être une nécessité, puis une tendance et enfin, il s’est inscrit comme une « norme » à l’échelle mondiale. Si beaucoup ont vu une réelle opportunité d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, d’autres ont estimé qu’il créait au contraire de nouvelles problématiques sur le lieu de travail.
Les employeurs ont commencé à offrir de nouveaux avantages ou à les améliorer afin d’inciter les employés à revenir au bureau, du moins le pensaient-ils. Face à l’échec de cette démarche, certains ont commencé à imposer le « retour au bureau ». Les salariés, quant à eux, ont clairement fait savoir que la flexibilité n’était pas un critère négociable.
Des missions plutôt que des horaires
Pour Owl Labs, la mutation reste d’actualité. Et elle marquera cette nouvelle année. Une tendance pour 2025 sera la fin des horaires de travail traditionnels. Ceux-ci cèdent de plus en plus la place à des modèles de travail axés sur les missions, 33 % des salariés se réservant des créneaux horaires de concentration pour pouvoir optimiser leur productivité.Pour s’adapter, les entreprises devraient adopter une approche plus souple, notamment des journées sans réunion, et valoriser les résultats plutôt que les horaires fixes, estime le spécialiste des technologies collaboratives.
De fait, selon sa huitième étude, les collaborateurs placent désormais la semaine de quatre jours et les horaires flexibles plus haut que les avantages en matière de prestations de soins et de santé dans leur évaluation des employeurs potentiels, ce qui souligne l’évolution vers l’autonomie et l’équilibre en tant qu’éléments clés de la satisfaction au travail.
Beaucoup de choses ont changé en l’espace d’un an
Pour Bianca Stringuini, il est temps d’élaborer une proposition de valeur pour le lieu de travail. « Si vous demandez aux salariés de revenir au bureau, vous devez réfléchir à ce que vous pouvez leur offrir en retour. Qu’il s’agisse d’opportunités d’apprentissage, d’une meilleure collaboration ou d’une mise en réseau, montrez à vos équipes comment le bureau peut les aider à se développer sur le plan personnel et professionnel. »
Et de proposer, aussi, d’améliorer les avantages existants. « Envisagez comment des politiques de congé améliorées et des congés sabbatiques pourraient offrir aux travailleurs la flexibilité qu’ils recherchent, sans perdre des compétences clés. »
Beaucoup de choses ont changé en l’espace d’un an. La pression concernant les obligations de retour au bureau reste modérément présente, les offres d’emploi sont désormais très claires sur les exigences en matière de travail au bureau, et les employés sont prêts à quitter leur emploi, soit directement, soit discrètement, si leur employeur ne répond pas à leurs attentes.
Retour au bureau …ou seulement trois jours au bureau
Le travail flexible ne se résume pas à « où » le travail est effectué, insiste Bianca Stringuini. « Si la localisation peut être cruciale pour votre entreprise, vous pourriez également offrir des horaires flexibles ou des bureaux temporaires afin d’offrir aux salariés plus de contrôle sur leur carrière. »
Malgré les discours anecdotiques selon lesquels « tout le monde est de retour au bureau », tout indique que près d’un travailleur sur deux travaille actuellement dans un format hybride, soit une hausse de 2 % par rapport à 2023, selon Owl Labs. Et trois jours est toujours le nombre de jours au bureau le plus populaire pour les travailleurs hybrides.